Optimisation de l’utilisation des engrais azotés dans la production de plantes ligneuses ornementales produites en plein champ

Optimisation de l’utilisation des engrais azotés dans la production de plantes ligneuses ornementales produites en plein champ

Par : Émilie Lemaire, agr., M. Sc., Chargée de projets, IQDHO

L’azote est l’élément nutritif le plus important dans la croissance des plantes. Les besoins des plantes en cet élément peuvent être comblés par le sol seulement en partie, et selon une proportion variable d’un sol à l’autre, en fonction de plusieurs facteurs. Les pépiniéristes qui produisent des arbres feuillus et conifères ornementaux en champ font donc majoritairement usage d’engrais minéraux azotés (EMA) pour combler les besoins de leurs cultures.

L’utilisation des EMA contribue à l’émission de gaz à effet de serre (GES) directement par la dénitrification de l’azote minérale dans le champ (N2O) et par la consommation de carburant (CO2) liée à l’application de l’engrais. Une bonne gestion des EMA est essentielle pour réduire les pertes dans l’environnement. Fractionner les apports et les synchroniser avec les besoins de la culture sont des moyens pour maximiser le prélèvement par les plantes et réduire les pertes dans l’environnement.

En production de plantes ligneuses ornementales en champ, la régie de fertilisation la plus répandue actuellement consiste à fractionner l’apport annuel en azote en trois applications d’engrais minéral (mai, juin, juillet). La fertilisation azotée automnale est encore peu répandue parce qu’une croyance populaire veut qu’un apport tardif en azote puisse nuire à l’endurcissement des plantes pour l’hiver. Pourtant, cette approche pourrait être plus avantageuse à divers égards. La tendance veut qu’au début de l’automne la température du sol et l’activité métabolique des arbres soient plus élevées qu’au début du mois de mai. Ces conditions sont ainsi plus favorables au prélèvement de l’azote par les racines. L’azote prélevé sera mis en réserve pour l’hiver et rapidement disponible au printemps suivant. En effet, pour plusieurs espèces, la remobilisation de l’azote dans l’arbre pour la croissance au printemps survient avant la reprise de l’activité racinaire et le prélèvement de l’azote dans le sol. L’accumulation de réserves est d’autant plus avantageuse pour les espèces qui n’ont qu’une seule phase de croissance rapide au printemps.

trees growing in a nursery field

Chênes de l’essai de fertilisation d’automne.
Source IQDHO

person measuring the trunk of a tree

Mesure du diamètre du tronc avec un pied à coulisse.
Source IQDHO

L’IQDHO a réalisé un projet pour déterminer en conditions québécoises l’effet d’une fertilisation minérale azotée, tôt au printemps et à l’automne, sur la croissance, la qualité, le contenu en azote et la survie à l’hiver des végétaux. Ce projet avait également comme objectif d’évaluer si un meilleur prélèvement de l’azote appliqué à l’automne plutôt qu’au printemps permettait de diminuer la dose annuelle présentement utilisée et ainsi de réduire les émissions de GES. Les traitements de fertilisation ont été testés sur des lilas (Syringa reticulata ‘Ivory Silk’), des chênes (Quercus rubra) et des thuyas (Thuja occidentalis) pendant deux ans.

Les données récoltées n’ont pas permis de démontrer que le prélèvement de l’azote et la croissance ont été plus importants à la suite d’une fertilisation azotée automnale (septembre et octobre) que printanière (mai). En fait, à la fin du projet, il n’y avait pas de différences significatives visibles entre les arbres des différents traitements, même pour ceux ayant reçu une dose de 50 kg d’azote (N) à l’hectare (ha) de moins annuellement.

Les résultats obtenus suggèrent donc que l’apport en azote pourrait être réduit sur certains sites sans compromettre significativement le rendement et la qualité de certaines espèces de plantes ligneuses ornementales. Avec l’élimination d’une application de 50 kg N/ha, un pépiniériste pourrait réduire les émissions de GES d’environ 807 kg éq. CO2/ha. Cependant, la sécheresse de 2020 a grandement nui à la croissance de l’ensemble des arbres et possiblement réduit la réponse des arbres aux différents traitements de fertilisation. Par conséquent, le projet aura soulevé le doute sur l’utilité d’une dose annuelle de 150 kg N/ha et démontré le potentiel de réduction des émissions de GES en réduisant la dose, mais des résultats sur plus de sites, d’espèces et d’années seront nécessaires pour déterminer les besoins en azote des nombreuses plantes ligneuses ornementales produites en champ.

Néanmoins, le projet a permis de répondre à l’une des principales préoccupations des pépiniéristes et conseillers concernant la fertilisation d’automne. Il n’y a pas eu plus de dommages hivernaux chez les arbres fertilisés à l’automne. Ce mode de fertilisation serait donc sécuritaire, du moins pour ces trois espèces.

Pour plus de détails, consultez le rapport final du projet : https://www.iqdho.com/images/stories/projets/RF_16-GES-13_IQDHO.pdf

Consultez la fiche synthèse : https://www.iqdho.com/images/stories/projets/Fichesynthese-16-GES-13%20IQDHO.pdf

« Ce projet a été réalisé en vertu du volet 4 du Programme Prime-Vert 2013-2018 et il a bénéficié d’une aide financière du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ) dans le cadre du Plan d’action 2013-2020 sur les changements climatiques (PACC 2013-2020). »

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