par Famke Alberts, Sarah Jandricic, Rodger Tschanz et Dr Al Sullivan
En collaboration avec Landscape Ontario, des chercheurs du MAAARO et de l’Université de Guelph ont mené un essai sur l’attirance des pollinisateurs présents en Ontario pour différentes espèces végétales. Cet essai visait en particulier à déterminer la place que pourraient occuper les végétaux non indigènes dans le paysage pollinisateur.
Pendant trois ans, des chercheurs et des techniciens ont examiné 10 espèces de plantes exotiques fréquemment cultivées dans l’industrie de la floriculture en serre en Ontario et les ont directement comparées à 10 cultivars d’espèces indigènes ou « nativars ».
Des travaux antérieurs effectués à l’Université de Guelph (2016 et 2018) ont porté sur des espèces végétales individuelles, mais de nouvelles installations mises à disposition par Landscape Ontario en 2020 ont permis la plantation de planches complète et, ainsi, de reproduire plus fidèlement la situation d’un jardin de résidence privée.
Une première sélection de plantes a été réalisée à partir des variétés qui s’étaient révélées favorables aux pollinisateurs lors d’études antérieures dans les parcelles d’essai situées au Guelph Turfgrass Institute. Des facteurs tels que la hauteur, le caractère saisonnier ainsi que le type et la couleur des fleurs ont été considérés pour la sélection finale. Les espèces ornementales ont été plantées à une densité correspondant à la taille à maturité de chaque variété.
Des étudiants ont surveillé les parcelles pendant 30 minutes à la fois, ont compté les pollinisateurs qui sont venus les visiter et ont pris soin de noter les plantes préférées des insectes. Un pollinisateur n’était enregistré que s’il se posait sur une fleur et y restait pour récolter du nectar ou du pollen. Les sites ont été surveillés par temps suffisamment ensoleillé. Au total, les élèves ont enregistré plus de 70 heures d’observation.
Les données recueillies en 2020 ont révélé que les parcelles entièrement composées de plantes indigènes ont attiré un peu plus de pollinisateurs en général, bien que la différence ne soit pas significative. En moyenne, dans une parcelle mesurant 2 m x 4 m, le ou la propriétaire d’un jardin privé pourrait s’attendre à observer environ 58 pollinisateurs par heure dans un jardin composé uniquement de plantes indigènes, contre 48 pollinisateurs par heure dans un jardin entièrement exotique.
Un examen des données révèle qu’il est faux de croire que les pollinisateurs préfèrent généralement les plantes indigènes. Comme le montre la Figure 3, la préférence des pollinisateurs est parfois allée aux plantes indigènes, parfois aux espèces exotiques. Par exemple, Coreopsis a reçu plus de 900 visites de pollinisateurs dans notre essai de 2020, mais d’autres espèces indigènes comme Phlox et Guara n’ont été que peu attrayantes pour les pollinisateurs (du moins ceux que l’on trouve en Ontario), ayant enregistré au total moins de 90 visites chacune.
Dans les deux catégories de plantes (indigènes et exotiques), les espèces végétales ayant reçu le plus grand nombre de visites de pollinisateurs ont eu tendance à attirer principalement des abeilles domestiques, des espèces d’abeilles indigènes ou les deux (Figure 3). Bien que les abeilles soient souvent considérées les pollinisateurs par excellence par les propriétaires de maison, elles ne sont pas les seules à contribuer à la réussite d’un jardin de pollinisateurs. Pour contribuer davantage à aider tous les pollinisateurs qui trouvent peu de sources de nourriture dans les zones urbaines, les jardins de pollinisateurs devraient soutenir autant de groupes différents (ou « guildes ») de pollinisateurs que possible. Par exemple, Argyranthemum n’a pas attiré beaucoup d’abeilles dans l’essai 2020, mais a attiré un plus grand nombre de syrphes et de coléoptères pollinisateurs que les autres plantes testées, ce qui en fait un candidat à ne pas négliger pour constituer un jardin soutenant à la fois l’abondance et la diversité des pollinisateurs.
Considérées dans leur ensemble, nos données suggèrent que les meilleurs jardins de pollinisateurs seraient probablement composés d’un mélange d’espèces végétales indigènes et exotiques. Cette liste des espèces remarquables a été dressée à partir des espèces et cultivars testés au cours de nos trois années de recherche. Bien que loin d’être exhaustive, cette liste constitue une bonne référence de départ pour tous ceux et celles qui souhaitent personnaliser leur jardin avec un mélange d’annuelles et de vivaces, indigènes et exotiques, favorables aux pollinisateurs.
Notons toutefois que les données montrent également que la variété choisie peut avoir un impact sur l’attirance des pollinisateurs. Les changements esthétiques que connaît une espèce végétale durant la phase reproductive, comme les variations des substances volatiles, de la quantité de pollen ou de nectar ou de la couleur perçue par l’insecte, peuvent également modifier les attributs attrayants pour les pollinisateurs. Ces connaissances ne sont pas nouvelles, puisque des publications antérieures ont montré que les pollinisateurs peuvent être attirés jusqu’à dix fois plus par une variété plutôt que par une autre. Cela peut expliquer en partie pourquoi certains de nos choix de plantes qui auraient dû être performantes ne l’ont pas été (par exemple, les nativars tels que Guara lindheimeri « Variegata Rose », Phlox paniculata « Purple Improved », Penstemon digitalis « Dakota Burgundy » et Heuchera villosa « Pinot Noir »).
Pour surmonter ces difficultés, les paysagistes et le personnel des jardineries peuvent recommander à leurs clients des cultivars spécifiques, tels que ceux inclus ici. Mais une autre solution consiste à recommander aux propriétaires de maison d’utiliser autant de plantes favorables aux pollinisateurs que possible – indigènes et exotiques – afin de maximiser leurs chances.